Par un jugement rendu au fond le  25 février 2021 (1), le tribunal judiciaire de Paris a jugé que le locataire commercial ne pouvait pas invoquer l’exception d’inexécution pou refuser de payer les loyers dus pendant le confinement (15 mars – 11 juillet 2020), faute de manquement du bailleur à son obligation de délivrance.

En effet, relève le tribunal, la configuration, la consistance, les agencements, les équipements et l’état des lieux remis par le bailleur  permettaient au locataire d’exercer l’activité à la quelle ils étaient contractuellement liés, et le trouble de jouissance dont le locataire se prévalait du fait de la fermeture administrative de son commerce pendant le premier confinement, imposée par les mesures législatives et règlementaires de lutte contre la propagation de l’épidémie, n’était pas garanti par le bailleur.

Voir déjà en ce sens, cour d’appel de Grenoble 5 novembre 2020 (16-04533), et plusieurs ordonnances de référé.

Cela dit, indépendamment de toute idée de faute du bailleur, l’impossibilité d’exécution du contrat pourrait justifier sa suspension (en ce sens, tribunal judiciaire de Strasbourg,  19 janvier 2021 (n° 20-00552).

La discussion reste ouverte car il ne faut pas oublier que l’obligation du bailleur d’assurer la jouissance paisible du locataire cesse en cas de force majeure (Cour de cassation, 3° chambre civile, 29 avril 2009 (n° 08-12.261).

Il ne fait pas de doute à notre sens que le Cour de cassation sera amenée à trancher.

(1) TJ Paris 25 février 2021, n° 18/02353)

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Michel ROUX

Docteur d’Etat en droit

Avocat

 

 

 

L’ACTION DU BAILLEUR EN CONSTATATION DE L’ACQUISITION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE

Par son jugement du 25 février 2021, le Tribunal judiciaire de Paris ajoute encore à la confusion ambiante concernant le paiement, ou le non paiement, des loyers commerciaux pendant cette période de Covid 19.

En référé, comme au fond ou devant le juge de l’exécution, tout est soutenu, et soutenable, avec plus ou moins de bonheur.  De l’exception d’inexécution à la force majeure,  en passant par la théorie des risques et la bonne foi, voire l’imprévision.

Ce jugement, fortement motivé,  a retenu pour sa part sur les conclusions du conseil du bailler,  qu’ « en application de l’article 1719 du code civil, le bailleur est obligé par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée en mettant a sa disposition, pendant la durée du bail, des locaux conformes à  leur destination contractuelle, dans lesquelles il est en mesure d’exercer l’activité prévue par le bail, et d’en faire jouis paisiblement celui-ci pendant la même durée. Cet article n’a pas pour effet d’obliger le bailleur à garantir au preneur chalandise des lieux des lieux loués et la stabilité du cadre normatif, dans lequel s’exerce son activité ».

Dès lors, dit le tribunal, il s’ensuite qu’ « en application de l’article 1728 du code civil, le preneur est tenu de payer le prix du bail aux termes convenus « .

Mais le tribunal ne s’arrête pas là. Poursuivent son analyse sur l’exception d’inexécution au sens des articles 1217 et 1219 du code civil, il juge que la locataire  » ne discute ni ne conteste pas  la configuration, la consistance, les agencements et l’état des lieux remis … en exécution du bail « , relevant que  » la fermeture administrative de son commerce …  imposée par les mesures législatives et règlementaires de lutte contre la propagation de l’épidémie de la covid 19 n’est pas garantie par la bailleresse « .

Ce jugement mérite réflexion car, à notre sens,  tout n’est pas encore tranché, sous la réserve bien entendu des voies de recours habituelles.

Tribunal judiciaire de Paris 25 février 2021, n° 18-02353

 

 

Michel ROUX

Docteur d’Etat en droit

Avocat au barreau de Grasse

L’action du bailler en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire